« Bruno et Jean » : Le roman historique sur les deux derniers condamnés à mort en France pour crime de sodomie

Une condamnation incompréhensible dans le Paris du milieu du XVIIIe siècle où la sexualité entre hommes était très banale

Dans la nuit du 4 janvier 1750, rue Montorgueil à Paris, Bruno Lenoir, cordonnier âgé d’une vingtaine d’années, et Jean Diot, domestique dans une charcuterie âgé d’une quarantaine d’années et portant un bandeau sur un œil - il est borgne- sont arrêtés et emprisonnés. Il ont été surpris « en posture indécente » par des policiers. Le 6 juillet ils meurent étranglés puis brûlés en place de Grève. Ils seront les derniers condamnés à mort en France pour crime de sodomie.

Sorti il y a quelques semaines en librairie, le roman historique Bruno et Jean de Pauline Valade est passionnant par ce qu’on apprend sur le Paris des années 1750 et plus précisément sur le milieu interlopes des « sodomites », « pédérastes », « bougres », « infâmes » et autres « chevaliers de la manchettes ». Ce sont les mots qui étaient utilisés à l’époque pour désigner les homosexuels, terme inventé un siècle plus tard par le Hongrois Károly Mária Kertbeny.
S’ils avaient leurs réseaux de connaissances et leurs lieux de rencontres, comme le jardin des tuileries, les quais de Seine et certains bars, leur sexualité était considérée par la morale comme un vice et une hérésie allant à l’encontre de la volonté divine. La prudence était donc de mise et le risque d’être arrêté le quotidien. Mais la procédure normale quand on se faisait prendre en flagrant délit, c’était de passer quelques jours à Bicêtre - à alors un hôpital prison particulière sinistre - et de repartir libre sans avoir au préalable juré de ne plus jamais s’adonner au « vice infâme ». Les seuls condamnés à mort pour crime de sodomie ne l’avaient en fait pas été pour cela seulement. Il s’agissait de criminels pédophiles et de meurtriers comme Étienne-Benjamin Deschauffours, étranglé et mis au bûcher le 24 mai 1726. Bruno et Jean n’avaient pour leur part aucun passif judiciaire. Alors pourquoi cette condamnation à mort qui a surpris tout le monde ? Plusieurs hypothèses sont abordés dans le livre, la plus crédible étant celle d’un emballement judiciaire sur deux « hommes de peu » qui ne bénéficiaient d’aucune protection.
En plus de nous plonger dans un passé qui demeure le présent dans des pays qui criminalisent l’homosexualité ou un futur enviable pour les LGBTphobes les plus radicaux de nos contrées démocratiques, Bruno et Jean est aussi un roman qui donne corps et âme à ces deux hommes injustement condamnés à mort.
Symboles de la cause gay, ils ont eu droit à une première plaque commémorative inaugurée en 2014 dans la rue Montorgueil à Paris. Mais comble de l’irrespect le plus incompréhensible, elle fut vandalisée en 2018 par un gay d’extrême droite militant contre le mariage pour tous (lire ici).

Autrice : Pauline Valade
Illustration : Alexandre Hesse, Hommage funèbre au Titien mort à Venise pendant la peste de 1576 (détail), 1833
Éditeur : Actes Sud
Nombre de pages : 368 pages
Format : 13.50 x 22.30 cm
Prix indicatif : 22,50 €

Rencontre et séance de dédicaces avec Pauline Valade, l’autrice de Bruno et Jean
• Samedi 9 Novembre 2024 de 18h00 à 20h00
La librairie La Petite Egypte
35 rue des petits carreaux, 75002 Paris
• Vendredi 15 novembre à partir de 19h
La librairie Les Mots À La Bouche
37 rue Saint-Ambroise , 75011 Paris

« Bruno et Jean » : Le roman historique sur les deux derniers condamnés à mort en France pour crime de sodomie

Une condamnation incompréhensible dans le Paris du milieu du XVIIIe siècle où la sexualité entre hommes était très banale

Lire aussi

Newsletter

Pour rester informé je m'abonne !

Suivez-nous sur les réseaux